- Voilà, on a construit le corps, le visage, les pieds, les mains du film, maintenant il faut chercher l'âme et le cœur.
Et on va chercher cela dans une rue large de Niort, rue de La Venise verte.
Et le cœur : c'est un baiser.
Le coeur bat vite et bien, la prise est facile.
Pour l'âme c'est autre chose.
Cela commence bien, un poème cinématographique, deux vélos qui se dépassent, deux enfants heureux et amoureux.
Mais on va chercher cette âme, très loin, dans les tréfonds des capacités de souffrance de notre pauvre Max.
Voici ce que cela donne sur le storyboard.
Mais dans la réalité du tournage, c'est une autre histoire, la séquence prend une tournure très différente!
Au début, c'est assez amusant avec la vélo accroché au pick-up.
C'est le sang qui pose un problème, le liquide est soit trop épais, soit trop fluide.
C'est un calvaire, plus de 17 fois, Max doit mettre le coton imbibé de sang dans sa narine.
Cette prise n'est plus amusante pour personne, la fatigue, la répétition de la scène, le sang qui ne coule pas comme il faut. Les enfants sont fatigués.
Petits combattants désabusés, c'est le sommet du film, l'Anapurna, tout le monde manque d'oxygène. C'est dur de conquérir l'âme du film. Le réalisateur est intraitable, il faut que le film trouve son souffle.
Heureusement entre les prises, il y a des pauses comme en haute montagne. Les enfants sous les couvertures pour se réchauffer.
- Allez les enfants encore une fois, une nouvelle prise.
Anne-Claire encourage, elle a l'habitude des colos et des enfants qui craquent presque à la ligne d'arrivée.
La tension est tellement forte, saturant l'air frais, que je préfère faire un tour et saluer les poules du jardin, qui insouciantes picorent entre les pâquerettes.
Et puis le moment de grâce arrive, même s'il ne sera jamais aussi intense que celui qui tourmente le réalisateur.
La douleur puis la liberté.... Il est libre Max, Lio aussi....